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Actualités

2013-06-10

Les abeilles dans un ecosystème sous haute tension !

Le 6 Juin dernier se tenait le colloque "L'abeille, indicateur des écosystèmes" au Museum d'Histoire Naturelle de Bruxelles, organisé par le Museum, Nature et Progrès et le SPF Santé Publique, Sécurité de la Chaîne Alimentaire et Environnement.

La journée a été ponctuée des cinq communications suivantes :

1. Abeilles sauvages: suivi des populations et programme européen de suivi des pollinisateurs (Denis Michez)

2. L'abeille comme sentinelle des pratiques industrielles, phytosanitaires et vétérinaires dans le Grand Ouest (France) (Monique L'Hostis)

3. Indicateurs de la santé des colonies d'abeilles (Cyril Vidau)

4. Contamination des ruches : l'exemple révélateur des insecticides systémiques dans les plantes, les pollens, les nectars et les abeilles (Jean-Marc Bonmatin)

5. Abeilles et contaminants : prise de décision dans le contexte d'incertitude scientifique (Laura Maxim)

Les informations glanées au fil des différentes interventions avaient trait spécialement à l'évolution des populations de l'abeille domestique et du rôle destructeur et scientifiquement avéré, par des tests en laboratoire, des insecticides utilisés dans les agro-écosystèmes. Les analyses étant assez coûteuses, on a à ce jour encore trop peu de résultats du terrain permettant de faire des liens clairs et quantifiés entre l'usage de nombreux insecticides (certains d'entre eux, pourtant répandus, ont une toxicité jusqu'à 10000 fois supérieure à celle du tristement célèbre DDT) et la mortalité observée partout en Europe, aux Etats-Unis et en Amérique du Sud.

 En guise d'introduction à ce colloque, Denis Michez de l'université de Mons, a brossé un tableau général sur l'évolution de la diversité des abeilles sauvages en Europe suite aux recherches menées dans le cadre du programme STEP (« Status and Trends of European Pollinators »). Le constat est le suivant: il s'agit d'un groupe très diversifié, composé de 6 Familles, 47 genres, 1951 espèces (cf. http://westpalbees.myspecies.info), mais dont la tendance est largement à la régression. Par exemple pour la faune Européenne des bourdons : 19 % sont en danger d'extinction, 26 % en régression, 36 % sont stables et 10 % en expansion (+ 9 % dont les données sont insuffisantes). En Belgique, sur 380 espèces d'abeilles connues en 1993, environ un tiers sont en régression, un tiers sont stables pour seulement 13 % en expansion (le quart restant est insuffisamment documenté pour donner une tendance).

Parmi les causes possibles de banalisation de la faune d'Apoïdes, toutes celles proposées par D. Michez sont directement concernées par le LIFE à l'exception de l'usage des insecticides :

- fragmentation et raréfaction des habitats. L'idée générale du LIFE ELIA est de développer un réseau d'habitats naturels par l'application des mesures de gestion les plus appropriées, voire la restauration/recréation de certains d'entre eux.

- raréfaction des légumineuses. L'importance de cette famille de plantes à fleurs pour les insectes butineurs mais aussi comme plante nourricière d'insectes herbivores (chenilles) est bien connue. On a donc prévu d'en intégrer dans les mélanges de graines (par exemple le lotier, la luzerne sauvage, les trèfles,...) pour l'action « Création de prairies fleuries allégées » (action C7).

- raréfaction des prés de fauche et prairies de haute valeur biologique. De tels habitats de haut intérêt biologique pré-existent à certains endroits sous les lignes et seront gérés comme tels au travers de l'action « Création ou la restauration de tourbières, landes et prairies maigres » (action C3) et dans d'autres cas on souhaite améliorer la diversité de certaines zones herbeuses banalisées en y appliquant une fauche tardive avec exportation du produit de la fauche via l'action « Installation d'infrastructure de fauche et de pâturage » (action C6)

- raréfaction de la flore messicole. Dans ce cas aussi on a donc prévu d'intégrer dans les mélanges de graines ces espèces au sein de l'action « Création de prairies fleuries allégées » (action C7).

- « nettoyage » des bords de route. Cet exemple rencontre exactement l'idée générale du LIFE, consistant à intégrer de nouvelle pratiques d'entretien de la végétation chez les grands gestionnaires d'infrastructures en réseau (routes, voies navigables, gazoducs, réseau HT,...)

Plusieurs de nos actions LIFE (C3, C6 et C7) répondent en partie aux facteurs de raréfaction des abeilles mais ce n'est pas tout. Parmi la diversification des ressources florales, les milliers d'arbres fruitiers sauvages que nous installerons dans les vergers conservatoires (action C2) et dans les lisières (action C1), en plus d'une dizaine d'espèces d'arbustes mellifères, viendront complémenter la flore herbacée se trouvant au milieu des couloirs forestiers. Mieux encore, les lisière restaurées par annelage sélectif des arbres et laissés en bois mort sur pied offriront rapidement des gîtes de nidification et d'hivernation pour les insectes dits « xylicoles ».

En conclusion, même si le LIFE ELIA n'a pas spécifiquement trait à la problématique de l'état des populations d'abeilles sauvages ou domestiques, un réel enjeu de conservation de la biodiversité va se jouer sous les lignes des réseaux de ELIA et de RTE, ainsi que des autres opérateurs de transport d'électricité que notre projet va rencontrer dans les 27 Etats membres, en favorisant, par une gestion appropriée des milieux ouverts intraforestiers.

Gageons que le développement de zones favorables aux butineurs insérées en zone forestières et donc pas directement soumises aux traitements insecticides, offre des ressources florales de qualité pour cette faune menacée.